Dans le cas du suivi et du traitement de la fibromyalgie, l’hypnose, bien que le niveau de preuve soit encore faible, permet au sujet de rétablir un schéma corporel souvent défaillant et ainsi d’initier une remise en mouvement profonde qui peut être entretenue grâce à l’autohypnose.
L’hypnose désigne un état de conscience modifiée (et non de sommeil), ainsi que l’ensemble des techniques qui sont utilisées pour y parvenir. L’état d’hypnose peut être créé par une personne extérieure ou par la personne elle-même. On parle alors d’auto-hypnose.
Nous sommes tous dans notre quotidien sujet à être en état hypnotique sans forcément le savoir. C’est un phénomène naturel, bienfaisant et même indispensable. Ainsi, lorsque vous êtes en voiture pour vous rendre au travail et qu’une fois arrivé, vous vous rendez compte que vous ne savez plus trop ce qui s’est passé durant le trajet et que vous êtes déjà arrivé, en fait, vous avez expérimenté un état de conscience modifiée, perdu dans vos pensées. C’est ce que l’on appelle être en légère transe ou en état d’hypnose.
Depuis peu, les neurophysiologistes, grâce aux progrès considérables de l’exploration du cerveau et de son fonctionnement, évoquent de nouvelles pistes concernant la fibromyalgie.
La douleur de la fibromyalgie est maintenant rapportée à une sensibilisation du système nerveux central (SSC) : elle reflète une réponse adaptative du système nerveux central à une surcharge nociceptive en termes de plasticité neuronale. L’augmentation de l’excitabilité neuronale, le renforcement de l’efficacité de la transmission synaptique et la levée d’inhibition au sein des circuits nerveux nociceptifs conduisent à un syndrome de sensibilisation altérant la neuromatrix et qui peut persister à long terme. La sensibilisation centrale peut être également produite par une altération cognitivo-émotionnelle (traumatisme) mettant en jeu directement des afférences des cortex préfrontal et cingulaire, de l’amygdale et de l’hypothalamus (réseau du mode par défaut). Par ailleurs, une altération de la sécrétion de dopamine a pu être identifiée dans les ganglions de la base chez certaines patientes souffrant de fibromyalgie en réponse à une stimulation douloureuse. La COMT (catéchol-O-méthyl transférase) qui régule la quantité de dopamine pourrait interagir avec le système opioïde, en modulant la réactivité à un stress douloureux.
On retrouve aussi souvent chez les personnes souffrant de fibromyalgie des trajectoires de vie parsemées d’événements douloureux et traumatiques comme le deuil d’un parent, l’abus sexuel, la maltraitance et les carences parentales. Les traces mnésiques laissées par toutes ces séquences génèrent chez le sujet des croyances sur lui-même et son entourage qui le poussent vers des répétitions douloureuses. L’ensemble de ces agrégats pathogènes entraîne une hyper activité du nœud amygdalien qui génère une grande instabilité émotionnelle et des perceptions corporelles vécues comme étranges, inexpliquées. Toutes les souffrances non symbolisées, puisque non élaborées, en lien avec les traumatismes anciens, vont faire retour dans le corps du réel sous forme de douleurs. Ces douleurs vont intervenir dans la vie du sujet comme des répétitions au cours desquelles vont se rejouer les sensations de rejets, d’isolement, d’injustice et de maltraitance.
L’hypnose est actuellement étudiée en raison de l’adéquation de ses cibles neuronales qui recouvrent largement les structures de la pain matrix (matrice de la douleur). Des suggestions proposées après induction hypnotique peuvent significativement améliorer l’expérience subjective de la douleur chez les patients souffrant de fibromyalgie. L’hypnose agit sur les structures impliquées dans le syndrome de sensibilisation centrale en réduisant son inflammation (action au niveau des noyaux amygdaliens sur les cytokines, substances secrétées par les cellules du système immunitaire). L’autohypnose est aussi intéressante, permettant au patient une participation active à la thérapeutique. Son effet se maintient sur la douleur, et particulièrement sur les composantes cognitives et affectives de la fibromyalgie : qualité du sommeil, catastrophisme, impression globale de changement.
Pendant la transe, l'hypnothérapeute dispose de plusieurs techniques (qui peuvent être mixées), adaptées aux patients souffrant de fibromyalgie. Voici quelques exemples :
L'externalisation :
On demande au patient de sortir la douleur de son corps et de se la représenter comme une personne ou comme un objet. Pour certains, cela peut être une boule noire, des charbons ardents... Pour d'autres, une personne associée à des souvenirs douloureux. Ensuite, on peut (par exemple) proposer à la personne de discuter avec sa douleur. C'est une démarche qui permet de prendre du recul : accepter d'échanger avec sa souffrance pour, paradoxalement, la dépasser.
La visualisation :
C'est une technique qui repose sur le principe de l'imagination active. On demande au consultant (selon ses propres représentations) de visualiser ses douleurs comme des flammes... puis d'en baisser l'intensité à l'aide d'un curseur imaginaire. Le simple fait d'imaginer une diminution de la douleur de manière active va "réveiller" certaines zones du cerveau qui sont, elles, associées au réel. Et la douleur diminue pour de vrai.
Les métaphores :
C'est l'une des bases de l'hypnose ericksonienne. Lors de la discussion préliminaire, on amène le consultant à mettre des mots sur ce qu'il ressent. Il s'agit de répondre à la question "Ce que vous vivez, ce que vous ressentez, c'est comme quoi ?" Certaines personnes vont parler d'étouffement, d'autres, de brûlure, d'autres encore de choc électrique, de pincement... À partir de ce vocabulaire, l'hypnothérapeute (en accord avec le consultant) va mettre au point une métaphore filée, qui sera développée pendant la transe. Par exemple, si la fibromyalgie est vécue comme une oppression, l'histoire parlera plutôt de portes ouvertes...
L'échelle de la douleur :
Celle-ci reprend le principe de la visualisation et permet de travailler sur l’autosuggestion. Placé face à une échelle de douleur imaginaire, le consultant évalue sa situation... et imagine comment il se sentira lorsque le curseur sera descendu. On sollicite ainsi des zones du cerveau associées au mieux-être. Parce que visualiser, imaginer, se représenter et concevoir une amélioration, c'est déjà aller mieux !
Les séances d'hypnose sont-elles remboursées en Belgique ? En Belgique, l'hypnose est une pratique reconnue par l'INAMI et peut être remboursée par les mutuelles. Cependant, les mutuelles et l'INAMI ne remboursent l'hypnose que si celle-ci est pratiquée par un psychologue ou un psychothérapeute.
Personnellement, je n’ai jamais essayé ni l’hypnose ni l’auto-hypnose. Et vous ? Si oui, quels avantages en avez-vous tirés ?
Texte rédigé à partir de