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MINUTE FIBROSOPHIQUE : DRAME

Il y a quelques mois, sur le plateau du JT de TéléMB, le journaliste annonçait aux téléspectateurs que j’avais vécu un « drame » : celui de mon arrêt de travail à cause de la fibromyalgie. Sur le moment, je n’ai pas réagi : on ne passe pas à la télévision tous les jours… Mais depuis, ce mot résonne en moi. Il m’apparaît inadapté, presque exagéré.


Qu’est-ce qu’un drame, au fond ?


Quand je pense à ce mot, ce sont des images de personnes vivant des tragédies qui surgissent : des victimes de guerre, des innocents condamnés, comme Olivier Van de Casteele, dont parlait récemment l’émission Investigation. Je pense aussi aux enfants maltraités, aux femmes violentées, parfois tuées par leur (ex-)conjoint, ou aux familles dévastées par des catastrophes naturelles, perdant tout, parfois même leurs proches. Et puis, ces innombrables personnes qui luttent pour survivre face à la famine, aux dictatures…


Un drame, pour moi, c’est la perte d’un enfant, l’ignorance de son sort quand il est arraché à nous, ou l’impuissance devant une maladie incurable et mortelle. En réalité, les drames de la vie nous rappellent à quel point nous sommes vulnérables. Ils surgissent sans prévenir et nous confrontent à notre propre humanité, à notre rapport aux autres et à la dureté du monde. Le mot « drame » est souvent employé pour évoquer la gravité d'une situation, les émotions profondes qu’elle soulève.


Y a-t-il des grands drames et des petits drames ? Peut-on mesurer leur intensité ?


Les drames sont avant tout personnels et subjectifs. Leur gravité dépend de la perception et de la sensibilité de chacun.


Est-ce un drame de vivre avec la fibromyalgie ?


Je l’ai cru, à un moment. Quand j’ai perdu pied, quand la douleur, la fatigue, et mon incapacité à gérer mon travail et même ma vie m’ont submergée, j’ai cru me noyer. J’ai même eu peur de ne plus pouvoir marcher… Certains ont vu ma détresse comme une faiblesse. Pourtant, je luttais de toutes mes forces pour refaire surface. Et aujourd’hui, si je ne suis plus au fond du gouffre, c’est bien que j’ai trouvé les gestes justes pour remonter des profondeurs. J’ai appris dans cette obscurité abyssale.


Avant, je pensais « drame ». Aujourd’hui, à la surface, bien que je ne sois pas une nageuse professionnelle et que la traversée soit encore parfois difficile, je ne pense plus à un « drame ». J’irais même jusqu’à parler d’« opportunité ». Je n’emploierais pas le mot « chance », non…


Pourquoi « opportunité » ?


Parce que la fibromyalgie m’a non pas permis, mais forcée à m’interroger sur moi-même, sur mes priorités, sur le sens de ma vie ; à m’arrêter, tout simplement. Grâce à cette pause, j’ai énormément appris, notamment sur moi. J’ai découvert des facettes de la vie que je ne connaissais pas et rencontré des personnes formidables.


Alors oui, j’ai peut-être traversé ce que l’on pourrait appeler un drame… mais je ne le vois plus ainsi aujourd’hui. C’est sans doute pour cela que l’usage de ce mot me gêne : il n’est plus adéquat, il ne reflète plus ce que je ressens.


Si aujourd’hui, vous traversez ce que vous percevez comme un drame, gardez l’espoir que cela puisse changer. Laissez la porte ouverte à un futur plus lumineux. Il faut souvent du temps pour surmonter les obstacles, mais une fois de l’autre côté, on retient surtout ce que l’expérience nous a apporté. Comme le disait Valérie Dupuis lors de l’escale positive, la clé est dans la résilience.


Ce qui serait véritablement dramatique, je crois, ce serait de fermer cette porte, de se laisser engloutir par les profondeurs… et de perdre ce lien avec soi-même.

 


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