MINUTE FIBROSOPHIQUE : TROP
- Violaine Desmette
- 25 mai
- 2 min de lecture

Quand on est atteint·e d’une maladie chronique, douloureuse, invisible — comme la fibromyalgie — on apprend vite une chose :
Quoi qu’on fasse, c’est toujours trop.
Si on parle de la douleur, on se plaint trop.
Si on n’en parle pas, on exagère sûrement.
Si on sourit, c’est qu’on va bien.
Si on fait la tête, on dramatise.
Si on essaie d’avancer, on n’a pas besoin d’aide.
Et si on demande de l’aide, c’est qu’on abuse.
Trop victime. Ou trop forte pour l’être vraiment.
Trop douloureuse pour être crédible. Ou trop maquillée pour être crue.
Un jour, une membre m’a dit, avant un rendez-vous médical :“J’efface mon sourire. Je ne me maquille pas. Il faut avoir l’air malade pour être prise au sérieux.” Elle ne mentait pas. Elle adaptait son apparence à une société qui ne croit que ce qu’elle voit. Et qui veut voir la douleur sur le visage, dans les yeux, dans l’effondrement.
Mais pourquoi faudrait-il avoir l’air éteint·e pour être entendu·e ? Pourquoi sourire, s’habiller, rire même serait un acte suspect ? Faut-il vraiment falsifier sa joie pour prouver sa souffrance ?
On peut être malade et chercher la joie.
On peut être souffrant·e et vouloir vivre.
On peut porter un sourire et une douleur, en même temps.
Et non, ce n’est pas trop. Ce n’est pas du théâtre. Ce n’est pas de la triche. C’est la complexité du réel. Et c’est justement pour ça qu’on mérite d’être écouté·e, aidé·e, soutenu·e. Pas malgré ce qu’on montre. Mais parce que ce qu’on vit ne se voit pas toujours.
Alors oui, ça suffit. C’est trop, cette suspicion constante, ces jugements, cette obligation de prouver l’invisible. Trop de méfiance. Trop de doutes. Trop de barrières.
Il est temps que cela change.